OWNI http://owni.fr News, Augmented Tue, 17 Sep 2013 12:04:49 +0000 http://wordpress.org/?v=2.9.2 fr hourly 1 La com’ de Danone et Nestlé envahit Facebook http://owni.fr/2012/04/30/la-com-et-le-lobbying-de-danone-nestle-sur-facebook/ http://owni.fr/2012/04/30/la-com-et-le-lobbying-de-danone-nestle-sur-facebook/#comments Mon, 30 Apr 2012 10:53:42 +0000 Claire Berthelemy http://owni.fr/?p=106700 fan pages à la gloire de leurs produits. Enquête sur le média sur mesure des Danone, Nestlé, Orangina et autre Nutella.]]>

Pour l’agroalimentaire, le média le plus séduisant du moment, qui peut être modelé à souhait, c’est Facebook. Dernière illustration en date, les conférences de Digital Paris des 11 et 12 avril dernier, congrès de marketing et “e-commerce de demain”. Au programme : ”Les réseaux sociaux : pour quelles attentes et comment y répondre ?”, ”Comment activer les communautés sur internet ?” ou encore ”Comment recruter, fidéliser et… AIMER vos fans sur Facebook ! ” Aujourd’hui, être sur Facebook est quasi indispensable et complémentaire de la présence sur les blogs. Notamment pour la galaxie des marques de l’agro-alimentaire.

10% des budgets pub

Conséquence, Danone, Nestlé, Orangina entre autres prennent en main leur présence sur Facebook par l’entremise de fan pages dédiées à leurs produits industriels, animées par des agences ou des services de com’ qui, la plupart du temps, n’apparaissent pas es-qualité. Manière de contrôler les discours des internautes sur les réseaux sociaux, sans trop le dire. Oasis, ce sont quelques 2, 3 millions de fans, M&M en compte 1 640 000 et les commentaires atteignent parfois la barre des 300 pour un simple statut, Danette ce sont plus d’1 220 000 fans, Carambar dépasse les 700 000, Trésor de Kellogs, 470 000 fans et une grande dose de n’importe quoi.

Louis Naugès, blogueur chez ZDNet, raconte dans un article publié suite au Sommet mondial du numérique qui a eu lieu à Paris le 13 avril :

J’ai été frappé de voir à quel point Danone prenait au sérieux la dimension numérique de ses activités : Bernard Hours, Vice Président du Conseil d’Administration a parlé des marques comme des « personnes » sur les réseaux sociaux et expliqué que Danone consacre déjà 10 % de ses budgets publicitaires à Internet.

Danone étant avec sa page Danette et Marine De Danette, sa community manager dédiée une des entreprises les plus présentes sur Facebook (et l’une des rares à être identifiée comme travaillant pour Danone). Alors que la majorité des marques ne savent pas quoi faire sur le site communautaire, elles sont toutes d’accord pour en être. Marine Landré, la community manager de Danette explique surtout que ce qui compte c’est de “prolonger la discussion avec les consommateurs en s’efforçant aussi de répondre aux commentaires faits sur les posts de la marque” :

À l’entrée des marques sur Facebook, il y a environ deux ans, il a souvent fallu trouver un moyen détourné pour entrer en discussion avec les “fans”. Le divertissement a alors été un levier important. Mais pour une marque, il est important de garder ce lien au produit et donc de trouver le bon mix. Nous avons souvent des gens qui posent des questions sur le produit en lui-même : sa composition, l’achalandage, les nouveautés à venir, ou autre. Mais pas que. Après c’est aussi parce que c’est Danette.

Danette, très peu sujette à polémique reste une des pages les plus vivantes – après Oasis et Orangina – notamment par l’implication de sa community manager dans les relations avec ses fans et par l’image que la marque véhicule auprès des familles. Facebook est un espace marketing comme un autre.

Anne Lataillade, blogueuse culinaire et community manager pour un produit dessert, sollicitée à hauteur de 80 communiqués de presse par jour en moyenne, constate l’attrait des marques pour le site de Mark Zuckerberg tout en relativisant et en expliquant que “c’est difficile pour les marques qui ne sont pas très digitales”. En effet, selon le public cible et la culture marketing du groupe ou du produit appartenant à une marque, l’attrait des fans est plus ou moins grand. Et pourquoi les fans sont-ils si nombreux ?

Sur Facebook, le community manager s’adresse à la communauté de sa marque. Sur un blog, on s’adresse à la communauté du blogueur. C’est déjà un peu différent : on s’adresse à des fans donc à des gens qui ont une opinion positive. Et surtout, les gens ont envie de parler avec les marques, ils ont envie de discuter, de participer, qu’on leur demande leur avis. Pour ça, l’endroit c’est Facebook et pas nos blogs.

Dans un même groupe pourtant, certaines pages sont moins actives que d’autres : Danone qui cartonne avec sa Danette et les jeux proposés voit sa page Velouté Fruix mourir malgré ses 125 000 fans. Ce qui fonctionne : les jeux concours et les cadeaux. En clair la participation des fans de la page qui permet aussi par capillarité de récupérer des amis de fans. L’affectif pour la marque joue un rôle dans les adorateurs de la première heure : élevé à la Danette, il est d’autant plus facile pour un fan d’aller liker la page, et ce indépendamment de la marque. Et l’affectif est une des raisons pour lesquelles les marques savent qu’elles ont intérêt à être sur Facebook si elles souhaitent communiquer avec leurs consommateurs, adorateurs de produit. Nutella, qui ne possède qu’une fan page officielle internationale, attire plus de 15 millions de fans.

Charles Martin-Laval, fondateur de l’agence AdsOnWall, décrypte le paysage :

Depuis 2010, on sent vraiment une forte demande de la part des marques. Facebook avant c’était marginal. Maintenant c’est très très demandé. Tous les types de marques, surtout grand public. Les marques agro-alimentaires sont assez présentes et assez fortes sur le sujet. Quelques unes se sont fait connaitre. Oasis et M&Ms par exemple, pour lesquels il y a une image jeune – le critère est hyper important au lancement – dynamique, sympa décalée. Ce qui plait aux français.

Fails des fan pages

Mais les fans pages ont un côté obscur, une face noire redoutée par les community managers responsables de la gestion des interactions entre les fans et les moins fans. On garde en mémoire l’opération de Greenpeace contre Nestlé et KitKat pour leur utilisation d’huile de palme. En mars 2010, l’ONG avait arrosé le web de sa publicité trash, pure imitation de la publicité KitKat Have a break have a kitkat, dans laquelle un cadre trentenaire mangeait des doigts d’orang-outan en lieu et place du biscuit de Nestlé, tout droit sortis de leur emballage. Moult réactions sur leur fan page plus tard, volonté de modération des commentaires par Nestlé et explications de la marque, fermeture de la page puis réouverture, l’affaire a fait trembler la fan page. Et par ricochets, la marque.

Passé ce mauvais coup pour Nestlé, d’autres ont défrayé la chronique : le community manager d’Orangina en juillet dernier a actualisé le statut de la boisson en apostrophant les fans d’un message tout en finesse : “Harry Potter c’est n’importe quoi, encore la magie on veut bien, les balais qui volent pourquoi pas mais un roux qui a des amis ?”. 354 commentaires aujourd’hui, la plupart négatif, d’autres plus nuancés.

Mais hormis les fautes de communication, depuis la marque, restent les spammeurs, commentaires indésirables et indésirés. Chez Danette, Marine Landré explique :

Il y a plusieurs types de spammeurs, à différencier. Si c’est juste un lien sans rien d’autre, souvent un robot : à titre personnel je me permets de le supprimer et reporter à Facebook, qui prend ensuite les mesures nécessaires. Il arrive aussi d’avoir des utilisateurs spammeurs (“les trolls”). Mais aussi des consommateurs mécontents. Dans ce dernier cas, aucune raison de supprimer : je laisse tous les commentaires négatifs, tant qu’ils sont en accord avec la charte de la page (pas d’insultes par exemple). Après sur Danette c’est assez rare puisque nous avons la chance d’être une “brand love” assez peu controversée donc.

La gestion de crise est non seulement une histoire de charte du bon commentaire poli mais aussi une histoire de génération. Ceux qui décident ne sont pas ceux qui se servent de ces outils de communications. Explication avec Anne Lataillade pour qui non seulement les décideurs ne sont pas toujours utilisateurs mais par ailleurs quand les marques ont compris ces outils, parfois, elles“en ont peur”. Peur de l’affront ou du scandale qui tâche ?

L’espace des fans laisse libre court à la contestation. La maitrise du discours lisse et propre n’est pas toujours possible et peuvent ressurgir divers scandales, de façon récurrente. D’autant plus que certains groupes sont maitres en la matière. Exemple avec le groupe 1% SPAM, aujourd’hui plus ou moins à l’abandon. Issu du mouvement des indignés, la page de l’évènement annonce la couleur :

“Si vous avez l’impression que vous êtes trop petit pour pouvoir changer quelque chose, essayez donc de dormir avec un moustique…vous verrez lequel des deux empêche l’autre de dormir”
- Dalaï Lama -

Le principe des membres invités : déposer du poil à gratter par commentaire sur les marques ou les produits qu’ils ont dans le collimateur. À commencer par “ceux qui ont tendance à vouloir nous faire “avaler n’importe quoi”! et la lisse communication sur un produit se retrouve face à la volonté des détracteurs. Leur objectif est avant tout de tirer la sonnette d’alarme pour les adorateurs de ces produits et prendre les entreprises dans le filet de la communication sur le net, dont Facebook. Avec pour simple principe d’aller porter et réagir sur les pages des grandes marques “toujours en respectant les règles de savoir vivre et la politesse.”
Dans leurs cibles :

- Parler des OGM sur la page d’un des produits Nestlé
- Demander si vous pouvez utiliser le chocolat à tartiner comme huile de moteur sur la page Nutella

Et leurs précautions : “Sachez repérer les “fake accounts” qui se chargent d’écrire des faux commentaires pour valoriser les produits sur les pages commerciales.”

Faux comptes

Autre question soulevée par l’utilisation des réseaux sociaux, l’achat de fans et l’utilisation de faux fans – achetés eux aussi – ou comment ruiner son image de marque. Fred&Farid, une agence de publicité créée avec le soutien financier de Vincent Bolloré et trois anciens du groupe Publicis de Maurice Lévy, a de nouveau fait parler d’Orangina. Ils sont soupçonnés mi février par CoupsdePub.com d’avoir acheté des lots de fans pour la page du produit. En douceur, la marque dément aujourd’hui avoir été au courant de ce type de pratiques.

Pour Charles Martin-Laval ”c’est une dérive dans le sens où c’est la guerre au nombre de fans” et ce même si Facebook a permis d’en diminuer l’impact en intégrant aux fonctionnalités des pages un compteur d’interactions.

L’achat de fans, c’est pas qualifié du tout, il faut aller chercher sa cible. Ça ne sert qu’à faire jalouser ses concurrents mais pas plus. Au contraire ça apporte le risque de mauvais commentaires sur la page de la marque.

Au dela de l’achat en lui-même, les agences qui travaillent pour le community management des produits sont sous pression du résultat de fin de mois : la taille critique de la base fans flirte avec la crédibilité du travail de l’agence. Tentant donc d’atteindre par des moyens détournés un nombre de fans considérables.

“Je pense qu’il est important d’atteindre une taille critique sur une page Facebook, notamment pour pouvoir justifier des investissements dans le but d’animer la communauté (telles que des applications)” sourit Marine Landré. “Pour des petites pages qui sont moins surveillées cela est probablement tentant. Ceci dit je ne cautionne pas du tout cette pratique. Il y a eu un tournant entre l’arrivée des marques sur Facebook et ces six derniers mois : aujourd’hui de mon point de vue, l’engagement est le plus important. Aucun intérêt de rattraper Oasis.”


Illustrations et couverture par l’excellent Christopher Dombres [CC-by]

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Les eaux troubles de Châteaud’eau http://owni.fr/2011/07/07/eau-chateaudeau-danone-sante-bacterie/ http://owni.fr/2011/07/07/eau-chateaudeau-danone-sante-bacterie/#comments Thu, 07 Jul 2011 16:53:48 +0000 Sylvain Lapoix http://owni.fr/?p=73008 L’entreprise Châteaud’eau, célèbre distributeur de fontaines d’eau pour les entreprises et les collectivités, a mis sur le marché deux importants stocks de bonbonnes contenant des éléments toxiques. Contrairement aux préconisations de son laboratoire d’analyse, la société les a commercialisés alors qu’ils contenaient la Pseudomonas aeruginosa, une bactérie potentiellement dangereuse, voire mortelle pour les personnes à la santé fragile.

Les faits que nous révélons remontent à l’année 2007. Selon les documents obtenus par OWNI, à cette période, la qualité des bonbonnes de Chateaud’eau (à l’époque propriété du groupe Danone) était contrôlée par un laboratoire interne à l’entreprise. Or, en date des 28 et 29 juin, les analyses bactériologiques de ses experts signalent que les lots produits dans l’usine Passy de Chateaud’eau sont non conformes. En cause: la présence de la bactérie Pseudomonas aeruginosa dans les échantillons prélevés.

Une découverte qui aurait dû conduire la société Chateaud’eau à ne pas vendre le stock incriminé (à raison de plus de 500 bonbonnes de 20 litres d’eau scellées par heure, chaque stock journalier peut compter de 4000 à 5000 bonbonnes). Or, malgré l’avis de la laborantine (que nous avons contactée mais qui n’a pas souhaité être citée), le stock en question a bien été livré aux clients. Et « à la demande de la direction générale », comme le mentionnent les documents ci-dessous:

Contactée par OWNI, la société Châteaud’eau n’a pas donné suite à nos sollicitations.

Superbactérie

En France, au titre de la santé publique, les critères d’évaluation microbiologique sont fixés par le gouvernement, en application des directives européennes. Concernant la qualité des eaux de boisson, l’arrêté du 14 mars 2007 ne laisse aucune ambiguïté. Il exige que la Pseudomonas aeruginosa soit totalement absente des échantillons d’eau examinés. Soit zéro tolérance par 250 ml d’eau observés; comme les entérocoques et Eschierichia coli, ainsi que le précise le tableau annexé à l’arrêté de mars 2007.

Bien connue des milieux hospitaliers et de la petite enfance, la Pseudomonas aeruginosa est identifiée parmi les agents responsables de nombreuses maladies nosocomiales : anodine pour certaines personnes en bonne santé, elle peut se révéler redoutable chez les personnes immunodéprimées (dont le système immunitaire est affaibli, par la maladie, un traitement, la grossesse, l’âge, etc.).

Après lui avoir présenté les éléments dont nous disposions sur les bonbonnes Châteaud’eau, le Dr Francis Glemet, porte-parole de la Coordination nationale médecine, santé environnement (CNMSE) et pharmacien industriel en retraite, nous a décrit les risques encourus :

Chez les personnes immunodéprimées, la bactérie induit un risque d’infection septique : infection rénale, infection urinaire, septicémie… Quand le germe est installé dans une infection, elle se remultiplie toutes les 20 à 30 minutes et, si un traitement adapté n’est pas prescrit dans les meilleurs délais, elle devient très difficile à déloger. Dans le cas des infections respiratoires, la dégradation peut être très sévère et, dans certains cas, mortelle.

Bonbonnes à eau, bouillons de culture

Scellées et parfois stockées pendant de longues durées, les bonbonnes pour fontaines d’entreprise constituent selon ces chercheurs un « bouillon de culture » propice au développement des bactéries. Raison pour laquelle la plupart des hôpitaux ont renoncé à ce système, comme l’explique une syndicaliste CFDT de l’Assistance publique des hôpitaux de Paris :

Nous n’avons plus recours aux fontaines à eau à bonbonnes depuis plusieurs années : la plupart des patients ne s’en servaient pas, ce qui pouvait amener une même bonbonne à rester plusieurs mois en place, ce qui comporte des risques sanitaires non négligeables. Désormais, nous utilisons des fontaines réfrigérantes qui ont l’avantage de pomper sur le circuit d’eau courante et donc d’éviter la stagnation.

Installé à l’époque dans le XVIe arrondissement de Paris, Chateaud’eau avait obtenu une autorisation de pompage dans la nappe de l’Albien, à 700 mètres de profondeur. Une nappe reconnue pour sa pureté exceptionnelle du fait du long filtrage par les couches successives de roche. La source était à l’époque contrôlée par le Crecep, organisme public de contrôle de l’eau (depuis intégré à la régie municipale Eau de Paris). Or, comme le montrent les analyses (voir ci-dessous), ni le mauvais goût de l’eau, ni la présence de pseudomonas ne peuvent s’expliquer par la source à laquelle était pompée l’eau.

Selon une source interne, il s’agirait en fait du procédé de lavage des bonbonnes d’eau (récupérées après usage) qui comporte des risques de contamination. Une contamination que la direction générale de Chateaud’eau a décidé d’ignorer, peut-être influencée par un printemps caniculaire et les prévisions d’un été très chaud. Une chaleur à boire n’importe quoi.


Illustrations CC FlickR PaternitéPas d'utilisation commercialePartage selon les Conditions Initiales Earl – What I Saw 2.0

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